"S'il y a une obligation fondamentale pour le chrétien, [...] c'est l'interprétation spirituelle de l'Écriture. Sans doute, si l'on prend cette règle au sérieux, on ne peut manquer de s'attirer des tracas. Ceux qui entendent spirituellement la Loi subissent parfois une vraie persécution de la part de ceux qui la comprennent charnellement. [...] Ces amis de la lettre nient qu'il puisse y avoir une autre vérité que terrestre. Origène en compte plus d'un, jusque parmi ses auditeurs. Ils se moquent volontiers de ses interprétations. Ou bien ils s'indignent. Ils lui dressent aussi des embûches. Au besoin, ils emploient contre lui la calomnie. Ils lui reprochent d'en prendre à son aise et de faire violence à la Loi de Dieu, d'en corrompre le sens par des artifices humains. Ils l'accusent de deviner plutôt qu'expliquer, d'abuser des procédés de la rhétorique, de truquer des mots pour se lancer dans des allégories obscures..." (H. de Lubac, sur Origène).
Pas loin de 2'000 ans plus tard, les choses n'ont pas changé. Les chrétiens fondamentalistes interprètent textuellement les écritures, en tordent le sens qui était celui de l'Esprit lorsqu'il dictait ces textes aux écrivains de la Bible, s'en tiennent aux interprétations immédiates, qui n'ont pas besoin de l'Esprit pour être comprises. Et ils font comme du temps d'Origène : il persécutent (par des mots) ceux qui ont choisi la bonne part, la part spirituelle.
L'interprétation spirituelle, qui apporte une bénédiction mille fois supérieure à l'interprétation textuelle, est foulée aux pieds. C'est comme si ces personnes avaient peur d'être trop bénies... peut-être se sentent-elles, dans leur inconscient, coupables de résister à l'Esprit, donc indignes de telles bénédictions.
Quant à toi, lecteur, ne te prive pas des trésors que t'offre l'Esprit d'amour de Dieu : l'interprétation spirituelle des écritures, tel est le chemin vers la Jérusalem céleste!
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Ecoutons Origène :
Les choses qui ont été écrites sont formes et figures. Car l'apôtre dit : toutes ces choses leur arrivaient en figure, et elles ont été écrites pour notre instruction [...] (1 Corinthiens 10:11)
Eh bien! que tardes-tu ? Partons pour la guerre, prenons d'assaut la plus considérable cité de ce monde, la malice, et détruisons les murailles orgueilleuses du péché! Regarderais-tu alentour quel chemin il faut prendre, quel champ de bataille il faut choisir ?
Tu vas trouver, sans doute, mes paroles étonnantes - elles sont vraies pourtant :
limite tes recherches à toi-même! En toi est le combat que tu vas livrer, à l'intérieur de toi l'édifice de malice qu'il faut saper : ton ennemi sort du fond de ton coeur! (Matthieu 15:19).
Réalises-tu la puissance de cette armée ennemie qui s'avance contre toi du fond de ton coeur ? Les voilà, nos ennemis à massacrer au premier combat, à terrasser en première ligne! Si nous sommes capables de renverser leurs murailles et de les exterminer et qu'il n'en reste aucun pour le raconter, aucun pour reprendre haleine - s'il n'en est plus un seul pour reprendre vie et pour resurgir dans nos pensées, alors Jésus nous donnera le grand repos : "chacun se reposera sous sa vigne et sous son figuier, et nul n'effraiera désormais les enfants d'Israël!" (Michée 4:4).
(Origène, Homélies sur Josué)
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Ecoutons encore Origène :
Ismaël, fils de la servante, naît selon la chair, tandis qu'Isaac, fils de la femme libre, ne naît pas selon la chair, mais en vertu de la promesse. L'Apôtre dit à leur sujet qu'Agar enfanta pour la servitude un peuple charnel [Gal. 4:24], tandis que Sara, femme libre, enfanta un peuple qui n'est pas charnel, mais qui a été appelé dans la liberté [Gal. 5:1], liberté par laquelle le Christ l'a affranchi [Gal. 5:13]. Le Christ lui-même a dit en effet : si le Fils vous affranchit, vous serez vraiment libres [Jean 8:36].
Or, voyons ce qu'ajoute l'Apôtre dans son exposé : mais de même qu'alors, dit-il, le fils de la chair persécutait le fils de l'esprit, ainsi en est-il encore maintenant [Gal. 4:29].
Regarde comment l'Apôtre nous apprend qu'en toutes choses la chair s'oppose à l'esprit, que ce soit le peuple charnel qui s'oppose au peuple spirituel, ou que ce soit parmi nous ceux qui sont encore charnels qui s'opposent aux spirituels. Car, toi aussi, si tu vis selon la chair, tu es fils d'Agar, et par conséquent tu t'opposes à ceux qui vivent selon l'esprit.
De plus, si nous cherchons en nous-mêmes, nous trouvons que la chair a des désirs contraires à ceux de l'esprit, et l'esprit à ceux de la chair, et qu'ils sont opposés l'un à l'autre [Gal. 5:17] - et nous trouvons qu'il y a dans nos membres une loi opposée à la loi de notre raison, qui nous tient captifs de la loi du péché [Rom. 7:23]. Vois-tu combien ils sont importants, les combats de la chair contre l'esprit ?
Il y a encore un autre combat, plus violent peut-être que tous ceux-là, qui vient du fait que ceux qui comprennent charnellement la loi s'opposent à ceux qui la comprennent spirituellement, et les persécutent. Pourquoi ? parce que l'homme naturel ne reçoit pas les choses de l'Esprit de Dieu. C'est pour lui une folie, et il ne peut comprendre qu'on en juge par l'Esprit [I Cor. 2:14].
(Origène, Homélies sur la Genèse)
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